Fausses factures, évasion fiscale, prête-nom : la fraude dans le domaine de la construction ne date pas d’hier. Les coquilles vides, aussi appelées compagnies à numéro, sont de plus en plus dénoncées. Bien qu’elles soient légales sur le plan juridique, elles n’en sont pas moins fâcheuses sur le plan moral et économique.
Les entrepreneurs en construction peuvent légalement créer une compagnie distincte pour chaque projet qu’ils entreprennent. Le nom de l’entreprise mère sert ainsi de marque de commerce pour vendre le projet, mais ne figure jamais sur le contrat. En créant une compagnie pour chaque projet, l’entreprise mère se retrouve protégée par le voile corporatif. Ce dernier fait la distinction entre l’entrepreneur et sa compagnie. Les acheteurs se retrouvent alors sans recours lorsque, après une certaine période de temps, ils découvrent des vices cachés sur leur propriété : infiltration d’eau, problèmes de structure, mauvaise construction et plus encore comme le démontre cette histoire d’horreur. À ce moment-là, la compagnie à numéro qui figurait sur le contrat est vidée de son contenu et l’acheteur, pris devant cette coquille vide, doit assumer lui-même les frais associés aux quelconques problèmes découverts.
Une coquille vide pour chaque projet
C’est ce que dénonce l’épisode 19 de l’émission La Facture en s’infiltrant dans l’entreprise Habitations Trigone, qui, comme plusieurs autres entrepreneurs en construction québécois, bâtit des condos sur des coquilles vides. Bien que le nom de l’entreprise apparaisse sur les plans de construction, les affiches, la machinerie, et même sur les membranes d’isolation, elle n’apparaît sur aucun des actes notariés. Le vendeur est une compagnie à numéro. D’ailleurs, le cofondateur des Habitations Trigone, Patrice St-Pierre, mentionne que l’entreprise ne construit rien, elle donne les projets en sous-traitance à des entrepreneurs spécialisés. Le nom de l’entreprise n’est qu’une simple marque de commerce et chacun de leur projet appartient à une société distincte.
S’informer de son plan de garantie
Pour éviter ce genre de situation, il s’avère essentiel de bien s’informer au sujet de son plan de garantie. Au Québec, depuis 1999, le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs est obligatoire. Ce plan s’assure à ce que l’entrepreneur exécute correctement les obligations légales et contractuelles prévues au Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs. Cependant, cette garantie ne s’applique qu’aux maisons unifamiliales, jumelées ou en rangées ainsi qu’aux appartements ne comportant pas plus que quatre parties privatives superposées. De ce fait, pour les autres types d’habitations, certains promoteurs offrent une garantie conventionnelle non obligatoire. Cette garantie diffère d’un projet à l’autre, c’est donc à l’acheteur de s’informer du contenu de sa garantie et de sa durée avant de signer son contrat préliminaire.
L’acheteur devrait également s’assurer que l’acompte qu’il verse est protégé en tout temps par une garantie de remboursement, pour ainsi être en sûreté en cas de faillite du promoteur. C’est ce que prévoient les plans de garantie, et ce, habituellement jusqu’à concurrence d’un certain montant, variant entre 30 000$ et 50 000$. Si l’acheteur n’est pas couvert par ce type de plan, il devrait alors s’adresser à un notaire et lui demander de déposer l’acompte dans son compte en fidéicommis. En plus de la protection de l’acompte, le plan de garantie a pour objectif de protéger l’acheteur des vices cachés et des vices de construction ainsi que d’assurer la correction des défauts et le parachèvement des travaux.
En somme, rien ne vaut de bien s’informer au sujet de son promoteur, de lire attentivement le plan de garantie et surtout, de constater si le vendeur est une compagnie à numéro. Vous pouvez également visiter le site web de l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ) pour connaître la liste des entrepreneurs membres, celle-ci vous assure que les membres détiennent une licence de la Régie du bâtiment du Québec (RBQ). Pour la suite des choses, consultez notre article sur les assurances de copropriétés afin de démystifier celles-ci et de vous assurer une protection en cas de dommage.